Doit-on vraiment aimer son entreprise pour y travailler ?

17 février 2016

D’après un sondage OpinionWay, réalisé en septembre 2015 dans le cadre de la Fête des Entreprises, 66 % des Français interrogés déclarent aimer leur société.

Mais, alors que la crise frappe de plein fouet le marché du travail depuis plusieurs années, cette notion d’attachement a t-elle encore son importance ? Un salarié doit-il obligatoirement aimer son entreprise pour y travailler ou peut-il s’y épanouir sans adhérer à sa politique ou partager ses valeurs ?

Deux experts spécialistes du monde de l’entreprise et des RH ont accepté de confronter leur point de vue et nous apportent leur éclairage sur cette question très philosophique.

Oui. Une reconnaissance indispensable

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Didier Pitelet

Les salariés n’ont pas à sacrifier leurs valeurs personnelles sur l’autel des valeurs de l’entreprise. »

Didier Pitelet, président de OnTheMoon, groupe spécialisé dans le conseil en communication et réputation d’entreprise et créateur du concept de « marque employeur.

Même si l’origine du mot travail est Tripalium en latin, ce dernier ne doit pas être un acte de torture ou de mal-être » analyse en préambule Didier Pitelet.

Et en ce sens, l’adhésion à la culture et aux valeurs de l’entreprise reste un postulat.

Cette tendance risque de s’amplifier dans les années à venir auprès d’une nouvelle génération qui a de plus en plus besoin de se projeter dans un environnement culturel qui lui ressemble, qui la considère et la respecte » ajoute Didier Pitelet.

Pour ce dernier, cette question ne peut pas être un objet de débat car « on ne peut pas être heureux dans son travail si on n’adhère pas aux valeurs et à la culture de son entreprise. » D’où une explosion, ces dernières années, des phénomènes de mal-être ambiant, de stress au travail et de burn-out qui ne cessent de s’amplifier.

Cette réalité du mal-être est liée le plus souvent à une inadéquation culturelle entre un individu et une entreprise qui est censée être un modèle d’accueil et non un modèle de rejets » précise le président de OnTheMoon.

Pour que le travail ne devienne pas une source de souffrances, il est donc essentiel de ne pas le considérer comme une prison.

Chaque individu a le devoir, quel que soit son poste, d’essayer de faire changer le modèle ou de quitter son entreprise, lorsqu’il n’est pas en phase avec ses valeurs » déclare Didier Pitelet.

Même si ce dernier reconnaît que le principe de réalité lié à la précarité du chômage pousse aujourd’hui de nombreux salariés à faire des compromis.

Même si, aujourd’hui, les études montrent que la majorité des salariés se sentent bien dans leur entreprise et croient en leur dirigeant, il est important de leur rappeler qu’ils n’ont pas à sacrifier leurs valeurs personnelles sur l’autel des valeurs de l’entreprise. L’équilibre personnel dans le monde professionnel repose sur l’alignement de soi-même sur tous les compartiments de sa vie » rappelle le président de OnTheMoon.

Non. Un travail alimentaire

Jean Pralong
Jean Pralong

Pour une grande majorité de salariés, le travail est avant tout une façon de pourvoir à des besoins économiques et d’identité. »

Jean Pralong, psychologue, docteur en gestion et titulaire de la Chaire Nouvelles Carrières de Neoma Business School.

Pour Jean Pralong, au contraire, il est essentiel de se remettre en tête que le travail, ce n’est que du travail…

Beaucoup d’experts ont mis en avant l’importance de l’épanouissement au travail, en généralisant – à tort – à l’ensemble des salariés, l’idée que chaque individu serait en capacité de choisir son emploi et son orientation. Or, pour une grande majorité, le travail est avant tout une façon de pourvoir à des besoins économiques et d’identité » analyse-t-il.

Dans une société où la courbe du chômage peine à se renverser, il est en effet guère probable que la majorité des salariés ait aujourd’hui la capacité de choisir son travail. Elle est donc obligée d’accepter des postes dans lesquels la possibilité de s’exprimer ou de se réaliser est très limitée.

Il est donc possible de travailler dans une entreprise sans l’aimer en retour ?

Évidemment, assure le professeur de Neoma Business School. Dans un pays en crise économique, on travaille avant tout où l’on peut : il est prudent et protecteur de ne pas se donner sans réserves car il n’est pas certain d’y trouver de quoi être nourri subjectivement. »

De plus, la vie professionnelle n’est pas un long fleuve tranquille, car le travail mobilise des contraintes et des activités très hétérogènes.

Les salariés doivent éviter de se mettre dans l’idée qu’ils doivent adhérer absolument à tout ce qui se passe dans leur entreprise, car dans n’importe quel poste, ils devront toujours faire face à un certain nombre de contraintes et de satisfactions. »

L’emploi est parfois vécu de façon illusoire selon l’image de l’amour romantique : le leurre de la vocation, le mythe de la satisfaction absolue et la fusion totale avec le job idéal, comme un amour absolu avec son travail et avec son employeur. Mais la réalité de l’expérience de travail est faite de satisfactions et de contraintes, de joies et de frustrations.

« Il existe une sagesse à faire avec les contraintes dont on ne peut se défaire sans pour autant être moins épanoui dans son travail » conclut Jean Pralong.

 

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